jeudi 25 juin 2009

Pink

Et c'est comme ça que tourne le monde. Les choses segmentées, les putes et les femmes respectables, celles avec qui tu te marieras et qui te feront rouler des yeux au ciel et à gauche et à droite, et souffler dans tes narines qui se gonflent à mesure que tu t'amuseras de toutes les choses par lesquelles tu es passé.

A six mois de grossesse, elle ne voulait plus du tout de sexe, plus du tout c'est plus du tout (tu témoignes), impossible de ne rien lui demander ni de la toucher si gentiment qu'une plume de bébé pigeon aurait bien fait l'affaire. Le dégoût total, disait-elle, si sensible elle était et son ventre tout entier remontait jusque dans ses bras et ses jambes gonflées de trop de poids par-dessus qu'elle s'endormait épuisée de ne pouvoir rien plus faire.

Alors il y eut Fabienne, Fabienne dans ce séminaire à la con dont tu ne te rappelles plus le nom. Fabienne c'était une sorte de fantasme rabougri, la fille pas vraiment belle mais tellement interdite des teasings saugrenus à la pause café, les blagues un peu osées (pour tester les réactions) vous vous croisiez depuis plusieurs années et les études ensemble, de loin, et des rencontres fortuites dans les ascenseurs (elle vient passer un entretien d'embauche). Fabienne elle était là et un peu délurée, avec le peu d'alcool de ces soirées à l'hôtel où on se fait bien chier à zapper sur les chaînes étrangères, un peu honteux de devoir payer le lendemain le supplément pay per view qu'on s'endort frustré, et la main sur la queue à n'oser rien faire, même pas de tâche sur les draps en coton sauvage. Fabienne alors, Fabienne qui rit pour un rien, Fabienne un peu seule et un peu triste ce soir, Fabienne qui monte facilement (elle est à ton étage), Fabienne à qui tu racontes tes histoires de mari trompé dans sa virilité promise à une femme enceinte qui ne veut plus de lui (même si c'est temporaire, les hommes ont des besoins). Fabienne qui écoute et tu la culbuteras rapidement, à en juter sur son cul alors que tu croyais reprendre ton souffle. Fabienne qui s'excusera pour deux et qui te griffonnera son nouveau numéro de portable sur le calepin de l'hôtel, Fabienne que tu oublieras sur la table de nuit.

Mais Fabienne qui t'a fait tellement de bien à ne pas devoir demander si elle avait envie de toi, car c'était évident, Fabienne, même si elle n'est pas cette super bonne meuf que tu aurais été en droit d'attendre (statut upper class), Fabienne sympa pour te pomper le dard sans autre forme de procès et se retourner sans bruit pour que tu la lui mettes. Fabienne enfin, si gentille au fond d'avoir tout compris à la minute même où tu lui proposas ce dernier verre. Fabienne sous cloche, Fabienne pour plus tard. Fabienne, tu lui aurais bien envoyé un texto quand ta femme accoucha.

Fabienne, c'est toi, tu l'as décidé, la responsabilité incombe à tes épaules, Fabienne tu n'aurais pas pu être quelqu'un d'autre, Fabienne c'était toi qu'elle voulait, ou qu'elle ne voulait pas, car ce n'est pas ton problème. Fabienne, tu y penses de temps en temps, et tu soupires pour penser à autre chose.

Je tire, je tire, et la chair en-dessous de la peau en devient vive de sang à mesure qu'elle tombe.