dimanche 28 juin 2009

Les cimetières sont remplis de gens irremplaçables

Essayons de raconter une histoire, histoire qui aurait comme personnage principal un être classé féminin. Pour le bien de la chose, nommons-la Isabelle. Isabelle on la ferait naître en 1973, du genre assez facile à calculer son âge. Aujourd'hui. Isabelle, on l'affublerait d'un petit traumatisme enfantin, pas trop gros, mais qu'elle répéterait à l'envi histoire de préciser les méandres déterminants de son identité. Le traumatisme là, ce serait le divorce des parents. De ceux qui se passent mal, un père qui quitte la mère et qui lui chie dessus dans le dos, et inversement parlant, tout le monde prenant son camp du salaud et de la victime trompée dans son honneur et laissée à elle-même à élever trois enfants. Un frère et une sœur donc, pour Isabelle l'héroïne. Le traumatisme, il ferait qu'Isabelle dès que tu la connaîtrais de rien, elle te lancerait en soufflant de la bouche : je ne peux pas faire confiance aux hommes ; et elle expliquerait, les détails du traumatisme en question.
Après tu la prendrais à l'âge qu'elle a maintenant, elle aurait un métier aussi. Elle serait du genre par exemple assistante dans un cabinet d'audit en marketing. Un poste relativement merdique, par rapport aux 150 000 balles d'un père démissionnaire qui se rattrape en payant mes études de commerce haut perchées. C'est qu'Isabelle, te raconte-t-elle, a eu un enfant. Ah bon. Un fils oui, un accident, enfin, c'est que le flot continue.
Elle l'a rencontré lors d'une soirée du BDE. Ce qu'elle ne savait pas évidemment, puisque ces soirées sont faites pour que ses membres se reproduisent ; qu'on y trouve des maris, et des femmes, des individus sur lesquels assigner l'électricité d'un gland tendu à la durabilité d'un engagement sur papier, et devant représentants officiels. Et ce genre d'événements se passent les vendredi, ils permettent de digérer l'alcool tout en ne rentrant pas chez soi de tout un week-end, en se gorgeant de l'excitabilité à venir d'un prêt immobilier. Comme la vie est bien faite.
Exactement comme cela, ce qui lui est arrivé à Isabelle. Sauf que l'homme en question, une fois les échauffourées des quotidiens hermétiques et des idées qu'il n'y a que toi dans ma vie que je cherchais depuis toujours, s'est révélé absent, incapable de prendre ses responsabilités et criant des fois un peu fort le soir, quand il n'y avait pas de match sur aucune chaîne câblée. C'est là qu'elle a compris Isabelle, qu'on ne changerait pas la nature humaine, encore moins à coup de curetage pour une pilule oubliée sciemment. Elle le sait maintenant, et on ne peut plus la lui faire.
Si je rajoute qu'elle s'apprête à rejoindre ce soir l'actionnaire principal du cabinet où elle bosse, le même qui lui a promis qu'il quitterait bientôt sa femme, l'emmènerait sur la côte et plaît tellement à son fils, ça sonnerait comme une caricature ?