dimanche 20 décembre 2009

Politesse


Ils travaillent le matin sortent le soir dorment la nuit. Et le lendemain ils recommencent. Bouger c'est exister, arrêter c'est mourir. On ne garde pas son chapeau à table, on ne retourne pas le pain, on la fait passer devant, excusez-moi je vous remercie je n'en ferais rien non c'est moi. On ne dit pas de gros mots, ni ne mâche de chewing-gum devant la reine d'Angleterre, on surveille sa posture, on ne coupe pas la parole, on y met les formes, on évite de blesser, du moins intentionnellement.

Ils disent : ça ne te flatte pas quand on t'aborde dans la rue ?
Ils disent : lui avec ses airs je suis maqué j'allume et je ne touche pas ça va bien (hein)
Ils disent : tu peux y aller elles sont tellement bourrées il n'y aura pas viol

On ne parle pas la bouche pleine, ni même pour ne rien dire. Enfin, en théorie, puisqu'ils pourraient en remplacer des champs d'éoliennes avec leurs discours venteux. Des dizaines, des milliers, empilés de petits bras qui tournent, des yeux qui se plissent et des grandes dents blanches qui sortent sous les lèvres. 

Ils disent : la solitude c'est une maladie
Ils disent : on va te sortir de là
Ils disent : il faut faire quelque chose

Ils parlent aussi du froid et se posent des questions. Ils s'y mettent tous ensemble tous ensemble tous ensemble, hé hé. Pour eux qui s'y frotte s'y pique, et on ne peut pas dire qu'elle ne l'avait pas cherché. Pas de mot plus haut que l'autre, ils y mettent parfois les doigts et tentent de ne pas faire d'omelette sans casser d'oeufs. On ne met pas l'âne devant, on apporte un petit quelque chose.

On espère, et on ment.