Oh la la ils s'y mettent tous avec le feu de camp au milieu, les fesses bien calées les unes contre les autres, les coudes pas trop piquants. Ils digèrent faut dire, alors vaut mieux en faire des blagues, avec les rots qui râpent le fond de la gorge. Leurs voix qui sentent le pâté, le pâté mâché dans les bajoues, une sorte de modification génétique et vocale à base de charcuterie. Les narines qui se dilatent, les sourcils qui graissent, le coin des yeux qui plissent et le haut du ventre qui remue.
oh oh oh
ah ah ah
Les clins d'œil en soubassement, parce qu'ils sont par trop serrés pour se la tapoter et signifier leur entre soi qu'on a bien tous compris de quoi il en retournait. Parce qu'eux, ils ne sont pas comme ça, ils n'en n'ont pas de ce genre de problèmes : ni d'argent, ni d'addictions, ni de passades pour leur sucer la bite entre deux contractions. Non, ce n'est pas leur genre, au-dessus de tous à se la détailler, la poutre, qui leur dépasse du canal lacrymal.
C'est qu'il écrivent des livres, vous savez, et remplissent des pages et des pages de conneries pour parler d'un tas de merde, de leurs cheveux qui tombent, de leurs femmes qui les quittent, du temps qui passe. De leurs considérations existentielles entre deux lignes de coke ou deux prises d'anxiolytiques ; de leurs avis sur la marche du monde (dont tout le monde se fout) et sur la mort des idéologies. Et sur d'autres écrivains, aussi, les morts, à qui on aimerait bien ressembler parce que mourir à trente ans, finalement, quelle ultime sérénité. Quand on y pense. Et ils ont tout compris.
C'est qu'ils s'emmerdent, vous savez, parce qu'une bonne guerre ça leur donnerait peut-être l'occasion de se redorer le blason et de se la durcir, et que les choses soient bien claires – qui c'est qui commande, qui c'est ton papa. C'est qui, c'est moi.
oh oh oh
ah ah ah
C'est qu'ils changent l'eau des vases comme la fleuriste leur a dit (la bouche en cœur), avec des sachets de bicarbonate de soude et quelques grains d'aspirine. Dans ce genre de jour où tout est bouché.
Mais ça passera.