dimanche 13 décembre 2009

Résilience


Ils rentrent et ils sont en nage. Froid dehors et chaud dedans, les plaies d'un monde moderne et souterrain sur lesquelles un intellectuel de haut rang aurait certainement des choses à dire. Ils sont en nage, elle est plus petite que lui, il a un gros manteau pour enfermer ses mains, façon mystère parce qu'on ne sait pas ce qu'elle touche exactement, mais parce que c'est assez sensible pour que la supériorité tactile se fasse sentir et que le courant passe. Elle y met les mains, elle le tâte, il lui appartient - ils se collent en nage alors que rien n'est vraiment nécessaire ni vraiment confortable, mais c'est ainsi que les gens font pour s'assurer de soi. Et rassurer les autres aussi, en public, que rien n'est plus baisable qu'un bien baisé. Les plâtres essuyés et séchés, à vous d'y mettre les doigts : les rideaux sont repassés.
Elle le regarde par en-dessous, rapport à sa taille, mais rapport aussi à tous ces yeux qui en disent long avec les sous-entendus des draps froissés du plein après-midi qui rendent la clé au type de la réception avec les joues rouges et le regard brillant, façon flétan. Ils soufflent tous les deux et de la fumée en sort, et l'amusement des adultes si sereins quant à leur enfance sublimée qui plissent un peu les paupières et cherchent enfin leurs gants. La complicité, là, comme un bras dessus bras dessous, oh bien sûr personne n'y pense, il n'y a pas d'intention, on fait ça sans conscience à la va comme je te pousse.

Et ils les poussent aussi, les gens. Les ceux qui les regardent, au moins dans leur tête, les ceux qui bavent d'envie, l'aigreur en porte-jaretelle, les ceux sans rien à faire et qui ne perdront rien que les quelques minutes de leurs portes qui peinent à se fermer. Les gens la foule l'humain informe le groupe. Les têtes qui dépassent. La vie qui est si courte et dont il faut savoir profiter. Ils rient.

Il se serrent donc, elle les mains sur ses flancs, lui les bras autour d'elle, elle la joue dans son cou, lui le menton sur son crâne. Puis ses sourcils se froncent, il grogne, quelque chose le gêne. Elle s'accroupira pour retirer le journal froissé qui faisait crisser la semelle du dessous de ses chaussures.