mardi 1 juin 2010

Lessive

Ils ont des yeux tristes, des peaux grasses, des cheveux hirsutes, des ceintures colorées et des dents jaunes, des polos rentrés dans leurs pantalons, des revers à leurs jeans. Ils rient, ils rient, ils rient, collés, des élevages de pucerons sur des bâtons sucrés, bien serrés, bien au chaud, et tous tournent la tête l'un vers l'autre et se regardent derrière les rideaux.

Des avalanches de bonnes idées, de bons mots (applaudissements), les entraides se défont à mesure que les gens passent, s'enroulent et reviennent, au gré des relais d'opinion, des personnes en vue, des rumeurs persistantes sur untel, le voisin, de loin, celui qui ne parle pas assez pour être honnête.

Une existence tendue dans un unique mouvement, une oscillation permanente, un tournis sans fin sans faille, des joues qui rosissent, des sourcils relevés. Et ils s'en vont main dans la main, épingle à cheveux et peaux de bananes (« tu ne l'as pas volée celle-là »). Un mouvement de foule, la vague dans les gradins, la huée des spectacles et des mises en scène bien rodées pour confronter l'ennui et le mettre en cage.

Toujours alertes, suivis, guides, partenaires, jeux de dupes périssables, plans de table aléatoires, noyaux durs, peur, soumission. Serments de fidélité, partage, pour que jamais tu ne m'oublies. Dans les poches des petits cailloux secs et coupants, les mains saignent et les pupilles s'irritent, telle la poire pour la soif.

Prendre conscience de la clameur, du vide, et comme des cloportes sur le dos : paniquer.